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House / Nobuhiko Ōbayashi - Les Médiathèques de la Baie

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Première couche.
House se classe dans la catégorie des films d’horreur (au chausse-pied et avec un peu de vaseline merci). Sept lycéennes tout droit sorties d’un manga se retrouvent dans une maison hantée qui cherche à les dévorer. Sur le papier on sort pas trop du classique. Sauf que... (ça je vous laisse le découvrir).
Sorte d’Alice aux pays des merveilles (encore plus) sous acide, sa réputation de film à consommer en cas d’indisponibilité provisoire de votre fournisseur préféré de substances psychoactives n’est pas usurpée. Un film foutraque et coloré aux effets improbables au point que l’on se demande s’il s’agit d’une parodie, ou carrément d’une farce. Une farce qui s’incarne dans la connivence qu’elle crée avec le public et qui fait qu’on s’accroche. Peut-être devenons-nous même hantés par ce film qui nous dévore en nous regardant droit dans les yeux. C’est absurde, délirant et jouissif. Amusez-vous bien.

Deuxième couche.
Sauf que tous les films d’horreur parlent d’un traumatisme social. S’agirait-il ici de transformer le traumatisme en farce ?

Au-delà du vernis je ne peux en effet m’empêcher d’y voir une réaction à l’américanisation post-guerre mondiale et à un sentiment de perte de l’identité japonaise.
Le film nous rappelle en effet que les défunts survivent tant que ceux qui les ont aimés pensent à eux. Or cette volonté du souvenir ne semble s’exprimer que chez la tante, qui a choisi d’attendre son fiancé à jamais disparu, et chez le chat, incarnation peut-être des kamis ou yōkai d’autres temps, leurs yeux s’éclairant alors de deux scintillements d’une belle fluorescence vert-uranium, quand tous les autres ne rêvent que d’oublier cette période. Une opposition aussi entre la jeune génération insouciante des années 70, et celle de ses parents, qui referme difficilement les blessures de cette guerre que nombre d’entre eux ont vécu enfants.
Opposition entre ressassement du cauchemar et le rêve plus ou moins crédible qui devient norme à atteindre. Et le rêve de ce moment-là est américain, un ready-made industriel de la société de consommation sur fond d'acculturation et de décalage(s). Effets de miroirs déformants, Alice reste dans les parages. Occasion par là même pour l'artiste indépendant de tâcler les facilités des grands studios cinématographiques : recours au vulgaire, au prémâché et au clinquant, poudre aux yeux des spectateurs devenus vaches-à-lait.
Cependant, la maison est un monstre cannibale... faut-il alors assimiler le Japon traditionnel à un monstre ? À moins qu’il faille y voir une mise en garde, que le passé ne dévore pas la jeunesse et la pulsion de vie quand, presque 80 ans après la fin de cette guerre, elle ne cesse d’être présente à nos esprits, solidement accrochée à nous comme un stigmate que nous (les humains) entretenons soigneusement et qui ne nous empêche cependant pas de perpétuer l’horreur aux quatre coins du monde. Alors à quoi sert donc la mémoire.

Attention spoiler : j’ai beaucoup aimé. Pour une plus grande satisfaction de l’expérience, le regarder en mangeant des trucs qui font du bruit quand on les croque : chips, pop-corn, pizza trop cuite (mais tout de même dégoulinante de fromage, quand même, quoi), noisettes enrobées de chocolat, crudités criantes de fraîcheur (il ne faut pas les oublier non plus...), votre visionnage n’en sera que meilleur ! Je tiens à préciser par ailleurs que la version DVD de Potemkine embarque deux entretiens fort sympathiques et intéressants.

Fait marrant pour terminer, on doit l'origine de ce film à une demande de la Toho à Obayashi de faire le « Dents de la mer japonais ». Après visionnage, il tiendrait plus (au niveau du fond, les deux oeuvres étant formellement juste strictement à l'opposé l'une de l'autre) à mes yeux du Shinning de Kubrick... trois ans avant sa sortie... Amusant non ?

 

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